"Me tenant comme je suis, un pied dans un pays et l'autre en un autre, je trouve ma condition très heureuse, en ce qu'elle est libre." - R. Descartes

mercredi 15 septembre 2010

Quatre

C'est le nombre de cases de mémoire vive qu'il me reste. Parce que depuis que je dois communiquer en espagnol en temps réel, mon cerveau a réquisitionné de force tous mes clusters inactifs (et les autres) pour leur assigner des nouveaux mots, et a empiété sur la ram.

Alors maintenant impossible pour moi de retenir aucune combinaison de plus de quatre éléments ni, fait plus notable, aucun numéro de plus de quatre chiffres.

Le code d'entrée d'un immeuble : raté. C'est pas très grave, ici il n'existe pas de codes d'entrée, tout marche aux vigiles flanqués à l'entrée des immeubles qui reconnaissent les visages des locataires et surtout des intrus.

Mon numéro de carte de séjour : encore raté. Là c'est un peu plus gênant, même si on dirait pas comme ça, mais en fait ici le numéro de cédula, ou cédula extranjera pour nous, est comme un sésame qu'on te demande trois cent douze fois par jour. À la caisse du supermarché comme au restau ou lors d'une formation de survie aux incendies, ce numéro de six chiffres est la réponse à tous les problèmes de la vie quotidienne, et croyez-moi, si vous avez le malheur d'utiliser votre carte comme antisèche, non seulement ça se verra mais en plus ce sera du plus mauvais effet sur votre crédibilité. Imaginez ce que vous penseriez de quelqu'un qui regarde sa carte d'identité pour vous donner sa date de naissance... Eh bien ici c'est pareil pour le numéro "d'immatriculation" de chaque individu. Donc non seulement j'ai l'air d'une étrangère un peu cruche sur les bords (ou sourde, ou les deux), mais en plus j'ai l'air d'avoir usurpé l'identité d'une autre. Jolie réputation !


Mon numéro de téléphone : GROS FAIIIIIIL.
Pour les Colombiens, il existe un numéro plus important que tous les numéros de cédula réunis, il s'agit de celui qui fait que l'on a une vie sociale, le numéro de téléphone portable, voire les numéros, car ici il n'est pas improbable d'avoir autant de portables qu'il existe d'opérateurs, pour bénéficier de toutes les offres alléchantes du marché et surconsommer à souhait. Le téléphone est comme je le disais une condition sine qua non à la vie en société sur place. Il règne ici une paresse de la planification telle que le portable apparaît comme la seule option viable. On fait quoi ce soir ? Je t'appelle. Trucson est à l'étage ? Attends je l'appelle. J'ai faim - Viens on appelle pour se faire livrer. Si j'ai un problème sur le puits je t'appelle.
Ça c'est le "caller side", pas fondamentalement différent en Europe, quoique : ici, les gens ont banni l'usage des textos, par paresse ou incommodité, je ne sais pas trop, disons plutôt par coutume locale.

Mais ici il y a aussi le "called side", déjà plus banal pour ma partition Tunisienne, et franchement incongru pour l'Européenne qui sommeille en moi. Il s'agit de cette tendance (je pencherais plutôt pour le terme "manie") à systématiquement répondre au téléphone, en toutes circonstances, comme s'il s'agissait d'une question de vie ou de mort.
Dit comme ça, ça peut paraître normal, de répondre au téléphone quand il sonne. Oui, j'en conviens.
Mais alors que d'autres s'abstiendraient, les Colombiens répondent quand même :
- quand ils sont en pleine activité physique, genre une main en train de visser un écrou et l'autre en train de maintenir l'outil auquel on visse l'écrou. Pour ceux qui n'arrivent pas à visualiser le téléphone, un indice : les colombiens n'utilisent pas de kit main libre, et ont l'épaule droite franchement excentrée.
- quand ils sont en pleine réunion exceptionnelle avec toute leur hiérarchie (n+i avec i variant entre 1 et N, N étant supérieur strictement à 2)
- quand ils sont sur la route. Lors d'une réunion de sécurité, le gars qui faisait une sensibilisation sur les dangers d'appeler au volant implorait presque l'audience de s'arrêter pour recevoir des appels. Et les gens de se plaindre que ce n'est pas toujours possible de s'arrêter, et que parfois ça dérange plus qu'autre chose ; j'ai timidement tenté de proposer l'alternative où on ne s'arrête ni ne décélère "les gars, juste, répondez pas, ça MARCHE !" mais le son a pas voulu sortir de ma gorge pour des raisons encore obscures.
- quand ils sont aux petit coin. Sans commentaire.

2 commentaires:

  1. vraie question : "autant qu'il en existe" ou "autant qu'il n'en existe" ?

    Je vote la première, contrairement à "plus qu'il n'en existe". Qu'en dis-tu ?

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  2. je vote la première, corrige et m'excuse de t'avoir fait mal aux yeux. je suppose que par anonyme je dois lire adn ?
    salutations.

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