"Me tenant comme je suis, un pied dans un pays et l'autre en un autre, je trouve ma condition très heureuse, en ce qu'elle est libre." - R. Descartes

mardi 30 novembre 2010

Un pas plus loin : de l'esthétique

À mesure que le temps passe, les petits détails de la vie courante en Colombie, qui me frappaient il y a quelques mois, se fondent dans mon inconscient.
Je ne suis moins choquée de rencontrer des gens qui, passée la trentaine, arborent encore des bagues métalliques aux dents. Les vendeurs de minutes dans la rue font partie du paysage, les motocyclistes et leurs gilets orange fluo eux aussi, et je me suis presque habituée aux douches froides.

Maintenant je découvre peu à peu une autre facette de ce pays. En comprenant davantage la langue et après quelques mois de vie ici, je pénètre peu à peu la culture colombienne, les mentalités locales, je comprends davantage les gens et découvre ces différences qui étaient trop complexes pour que je les saisisse au premier coup de pinceau...

1er tableau.
Je l'avais déjà remarqué avant, les Colombiennes sont très soucieuses de leur esthétique. Il y a autant de coiffeurs que de banques à Paris. Elles ont toujours les cheveux fraichement coupés et colorés, les ongles impeccablement vernis.
Ce que je découvre peu à peu, c'est l'importance cruciale de l'esthétique dans la culture colombienne. Les coiffeurs ne sont que la partie visible de l'iceberg. Pour avoir un corps conforme aux canons de beauté, les femmes ne rechignent pas sur les moyens. Mais alors que nos commères européennes se mettraient au régime, au footing, à la salade et à la gym suédoise, ici l'arme fatale contre les kilos en trop ou les formes pas comme il faut c'est le bistouri. On aspire le gras, on insère du silicone, un anneau gastrique par-ci, une injection de botox par-là. Ici pas de tabou ni de complexe, la fin justifie les moyens.
Et la fin, c'est l'apparence. Il faut être vu. Ni elles ne cachent, pour être regardées, ni eux ne se cachent, pour regarder.
Est-ce la morale judéo-chrétienne qui a inculqué en Europe cette idée qu'il faille souffrir pour être beau (ou pour changer) ? Je ne saurais répondre à cette question, mais il me semble que même les personnes qui ont recours à la chirurgie esthétique en Europe tendent à le nier, comme si c'était mal ou honteux. Il réside une sorte de fierté à être maître de son corps, et à pouvoir le remodeler par la force de sa volonté, armé de patience, malgré les peines musculaires, et/ou la diète drastique.

Ce qui est sûr, c'est qu'en Colombie, les gens ne sont pas prêts à patienter, ou à s'imposer de changer d'habitudes alimentaires. Ajoutez à cela que les prix des opérations de chirurgie plastique sont moins élevés qu'en Europe, et que, au pire, bien des Colombiens ne résistent jamais à la tentation de contracter un n-ième crédit conso, et vous avez le cocktail idéal pour une prolifération de corps féminins qui, selon les lois de physique newtonienne ne devraient pas pouvoir tenir debout.

lundi 29 novembre 2010

un week-end (presque) comme tant d'autres

Il fait chaud en ce moment. Chaud comme une sieste grenadine tunisienne, comme un cagnard d'août caniculaire parisien, chaud et moite comme un jour banal de Barranca.

Troisième week-end du mois passé en entier sur un puits, on se fait à tout même aux nuits blanches, qui l'eût cru ! Pour le moment je suis en charge des jobs mais suis supervisée, ce qui veut dire que je suis responsable de tout, la préparation, l'exécution, la relation avec le client, mais qu'un "casque blanc" m'accompagne au cas où je ferais des bêtises, un peu comme quand on se fait couper les cheveux dans une école de coiffure ! Sauf qu'ici globalement le superviseur dort dans le pick-up et empoche le bonus des jours sur le terrain. Plus tard ça ne me déplairait pas d'être superviseur :) Mais bon avant cela il faut déjà que je sois promue...

Les nuits blanches ont cela de bien qu'elles nous offrent des "journées de repos". Dormir en plein jour étant une tâche ardue, et sachant que l'on ne remplace jamais vraiment du sommeil perdu, j'ai passé trois dimanches du mois en épave échouée sur mon lit, à regarder des films, des séries, et à manger des plats commandés. Aujourd'hui j'ai pris les choses en main et suis allée acheter une serviette de bain et de l'écran solaire au supermarché, car ma semaine de congé approche !

Avec S, mercredi matin nous décollons pour Bogota et dès jeudi, à nous Cuba !
xo xo


jeudi 25 novembre 2010

Entre rêve et réalité

Ça va faire un an que j'ai quitté paris, le mois de décembre gris et froid. Pour la deuxième année consécutive, j'échappe à un hiver rude, pour un mois de décembre chaud, ensoleillé, voire même carrément hallucinogène...

Tonight I have a dream.
Je m'étais assoupie, sous prétexte de reposer mes paupières, en rentrant du boulot vers 18h. À un moment je me souviens d'avoir allumé la clim, rapport à la chaleur de ce mois de novembre. Puis plus rien jusque 21h, et là je reprends conscience, le bruit de la clim ayant disparu, remplacé par une voix outrée au débit de parole qui est à un débit humain ce que la fibre optique est au 512k. Prostrée dans la pénombre de ma chambre, j'écoute ce bruit au loin.

Il y avait vraisemblablement une coupure de courant, mais je ne compris d'abord pas si c'était général ou propre à notre appartement. Une voix masculine menait l'enquête au dehors, et se plaignait : ah ça ! déjà ce matin j'ai dû laver ma chemisette Safari Lacoste, une édition spéciale que j'ai achetée super cher en plus, à la main car la machine à laver était en panne, et puis hier je voulais regarder le match, mais le câble fonctionnait pas, ça va pas là, ça va pas. Il entrecoupait ses plaintes de coups frénétiques sur l'interrupteur, ou peut-être était-ce quelqu'un d'autre, comme un tambourin accompagnerait un solo a capella. Au moment de reprendre sa respiration, cet individu qui parlait plus vite que Florence Foresti et Nelson Monfort réunis, en quelle langue je ne saurais vous dire, asséna 219 coups consécutifs sur l'interrupteur du corridor (des fois que y aurait une dynamo cachée dessous) ; je ne sais pas non plus comment j'ai fait pour compter, mais dans les rêves on remarque toujours ce genre de détails bidon, et on arrive à compter juste en réfléchissant, puisque finalement on crée le rêve à mesure qu'on le vit.
Ensuite il gueula un bon coup que cte vieille proprio n'était pas gênée, et scanda que c'était un scan-dale de devoir dormir par une telle chaleur sans clim ni télé ni accès internet et qui si c'était comme ça, ce n'était pas la peine.
Puis il sortit en claquant la porte, et une tripotée de petites voix se firent entendre, puis tout le monde sortit, silence. Puis retour du transistor vivant, seul. Je suis toujours blottie dans mon lit et écoute le bruit. Il va aux toilettes, ne ferme pas la porte, fait sa commission, ne se lave pas les mains, et s'en va à jamais. Silence.
Puis quelqu'un d'autre entre dans l'appartement, la voix semble celle de ma colocataire. Elle ouvre la porte de ma chambre, ce qui transforme ce rêve déjà bizarre en cauchemar, car elle n'est pas seule et car j'ai le vague souvenir d'avoir fermé ma chambre à clé. j'essaie de bouger, de parler, car elle m'appelle par mon nom et me dit de me réveiller. J'essaie d'articuler, de me mouvoir, mais je suis prisonnière, et ne peux que voir et entendre ce qui m'entoure sans être capable d'interagir. J'essaie de me concentrer, de me convaincre que ce n'est qu'un rêve, mais tout a l'air si réel. Je me sens saisie par le pied, coupe ma respiration pendant ce qui semble des heures... Je finis par reprendre une profonde inspiration, comme au sortir d'un plongeon prolongé. J'ouvre les yeux, bouge mes membres, ce n'était qu'un rêve.
La clim est éteinte, j'essaie de la rallumer, n'y arrive pas, mes yeux sont lourds, ma main aussi, la télécommande du climatiseur reste entre mes doigts à mesure que le sommeil me remporte. Je me rendors.

lundi 22 novembre 2010

boulot, intempéries et congés

Coucou les loulous !

Je suis de retour d'un job, mon premier en tant que superviseur ! Du design à l'installation, j'ai tout pris en main, comme une grande, que je serai bientôt (plus que un ou deux jobs et on m'offre un casque blanc !). Bilan du job : deux nuits blanches, dont une sous la pluie déguisée en stabilo jaune, cinq gros chiens qui ne m'ont même pas fait peur, treize packers enterrés sous terre, et UNE UNIQUE piqûre de moustique (sur la main gauche, qui a un pouvoir attractif visiblement très développé).

Ça c'était pour la partie qui intéresse le moins.

Sur le chemin vers le puits, le niveau de l'eau avait encore monté, à cause des gros orages que l'on subit quasi quotidiennement en ce moment. Les inondations touchent une grande partie du pays, il paraît qu'à Bogota c'est pire. Ici au moins, quand il ne pleut pas il fait très bon (25-30degC).

L'autre bonne nouvelle de la semaine, c'est que je suis libérée en congé lundi prochain en principe, pour une semaine. Je ne sais pas encore quoi en faire, j'essaie d'organiser un voyage avec S, une amie Italienne dont l'époux travaille à la base. Plus de nouvelles à venir.

Je vous laisse entre les mains de notre compère Barranmejo pour qui la pêche a été bonne (à la main je vous prie !). Photo non contractuelle prise sur le chemin du puits.

samedi 13 novembre 2010

S comme...

Imaginez un instant que l'on puisse retourner dans le passé juste l'espace de quelques minutes, et prodiguer à notre moi du passé quelques clés de l'avenir, comme le fait Marshall dans un épisode de HIMYM.

Quand j'étais plus jeune, mettons il y a dix ans, que n'aurais-je pas donné pour avoir juste un flash de l'avenir, de la profession que j'exercerais, de l'endroit où je vivrais, de toutes ces questions existentielles qui commencent à nous triturer l'esprit à mesure que l'on sort de l'enfance.
Je me dirais ceci...

Ma ptite K, du haut de tes ** printemps, tu vis en Tunisie, vas au lycée (collège et lycée étaient jumelés en un même établissement) tous les jours, et aimerais bien savoir comment ce sera dans dix ans.
Eh bien dans dix ans, tout le monde sera connecté à internet en permanence (oui ça ne marchera plus à la minute) et tu auras retrouvé tous tes camarades d'enfance via facebook (c'est comme un annuaire mondial, mais ça fait aussi msn) et les auras même revus, oui même les Belges.
Tout le monde aura un téléphone ET un pc portable, et le téléphone fera aussi appareil photo, et sera aussi connecté à Internet. Les jeans taille basse auront révolutionné la notion de bon goût vestimentaire, et il y aura un remake des schtroumpfs au cinéma qui aura plus de succès que Titanic à l'époque (t'en fais pas, tu resteras fidèle à tes principes d'Outkast cinématographique s'obstinant à refuser de voir ce genre de navets).
Bon sinon ma cocotte, tu ne seras pas encore mariée, et puis tes plans d'être mère au foyer à 23 ans et de procréer une équipe de basket au complet pour tes 30 ans auront lamentablement échoué (ou alors tu es grave à la bourre sauf si tu comptes sur des quintuplés).
Ah oui au fait tu vivras à Barrancabermeja, c'est une petite ville en Colombie, le pays ; et puis tu travailleras sur des plateformes pétrolières. Ah et au fait, achète des actions Google, et bosse bien ton espagnol.
Honnêtement, mon moi du passé n'aurait jamais gobé ça (surtout le coup des schtroumpfs), ou alors j'en n'aurais plus dormi la nuit, à rêver de la jungle et cauchemarder des narcotrafiquants et tout en essayant de comprendre comment ça arrive à tenir tout seul un jean taille basse...

vendredi 12 novembre 2010

Flooding

Avant, j'étais persuadée que pour qu'il y ait des inondations, il fallait qu'il pleuve des trombes d'eau gigantesques en peu de temps et/ou que le système d'évacuation d'eau de la région soit catastrophique, un peu dans le genre de celui de Tunis, où en guise d'égouts, ont été creusés des trous, plus ou moins profonds et plus ou moins reliés entre eux, qui en définitive recrachent leur trop-plein à la moindre bruine.

Depuis avant-hier, j'ai compris qu'il suffisait de se trouver près du lit d'un fleuve, là où il est bien large, pour être sûr de se trouver dans une cuvette, et sur la rive la plus en pente pour mettre toutes les chances de son côté de se prendre tout l'excédent de flotte en cas de crue. Après il suffit qu'il pleuve en amont, pour offrir une raison de s'émerveiller de la force de la nature et de s'arrêter pour contempler le paysage sous un autre jour...

Ça tombe bien, une bonne partie du champ pétrolier de Casabe, là où nous effectuons l'essentiel de nos opérations, de l'autre côté du Rio Magdalena, regroupe toutes ces conditions en ce moment !

En rentrant de notre job de dimanche, tout allait bien. Il n'avait pas plu les derniers jours, ou à peine quelques averses, mais rien de comparable aux gros orages pourtant très fréquents dans la région, qui auraient pu être présage de ce qui se tramait. Et hier, alors que nous nous rendions chez notre client, qui a planté ses bureaux d'opérations au milieu du champ pétrolier, nous avons vu ça :


Les machins rouges au milieu, ce ne sont pas des bouches d'égouts, mais des puits producteurs de pétrole, inondés à mi-hauteur (la moitié basse de chaque bouche est le reflet de la moitié supérieure dans la "flaque") ! C'est le cas de tous les puits qui bordent le fleuve dans la région, et c'est en train de chambouler tous les plans de nos clients, démunis, puisque les puits en cet état ne peuvent absolument pas être opérés...

Mais au-delà des puits, il y a quelques malheureux, moins nombreux que les puits certes, mais plus à plaindre je pense, qui avaient élu domicile près du rivage, dans des sortes de paillotes qui faisaient aussi buvettes ou vendeurs de glaçons, activités très en vogue dans cette région dont l'activité économique gravite autour des puits et de leur population qui travaille dehors, sous le soleil, et a besoin de se nourrir et s'hydrater, et de maintenir des boissons au frais toute la journée sans avoir de frigo. (oui ici on n'utilise pas des sacs de liquide bleu, on y va a la dure, à renfort de kilos de glaçons)


mercredi 10 novembre 2010

Du jour au lendemain

Les moustiques je connaissais depuis un bail, leurs piqûres immondes, j'avais déjà donné enfant, tant et si bien que mon corps ne se défendait même plus et que je ne ressentais plus rien.

Pourtant, mon histoire d'escadron de moustiques m'a quand même valu une main boursouflée relevant plus du gant de chirurgien dans lequel on aurait soufflé que du membre humain, des démangeaisons vingt-quatre heures durant sans discontinuer, et deux prises d'antihistaminique pour calmer le jeu.

(Voici la preuve en image, pour les plus sceptiques d'entre vous qui me prendraient pour une chochotte)


Mais cette histoire m'a surtout valu d'oublier l'essentiel de ma nouvelle aventure au pays des rigfloors : je ne crains plus les chiens !

Ne me demandez ni pourquoi ni comment. De même que ma phobie était inexplicable, sa disparition l'est tout autant. Un quart de siècle, une enfance à se cacher derrière la robe de ma maman au parc de Wolvendael, une crise de panique et de sanglots sur un puits en Colombie, et des litres d'adrénaline sécrétée auront été nécessaires à vaincre ce mal.

Faut imaginer la scène. Moi en coverall, bottes à coques, casque, gants, j'arrive sur le puits. Premier réflexe, instinct de survie oblige, je sonde le terrain, chien y es-tu, histoire de savoir où je mets les pieds. Un chien rat, un sac à puces et deux molosses (j'attribue le qualificatif de molosse à tout clebard dépassant mon genou au garrot, autrement dit à tout ce qui pourrait atteindre mes organes vitaux et à ma personne) constituent le cheptel sur ce puits, au moins je suis avertie. Ma vie de phobique suit son cours jusqu'à ce que...

Je ne sais comment, je me suis retrouvée immobile à un moment donné, soit le pire état pour la parano de la life que je suis, celui de vulnérabilité maximale, que cette lâche crapule que certains élèvent au rang de meilleur ami de l'homme saisit pour te bouffer la main, ou tout autre point d'accroche qu'il trouvera libre d'accès hors de ton champ de vision.
D'ailleurs un des deux molosses s'approche en catimini le bougre, et imaginez-vous qu'il me rentre dedans. Et moi, au lieu de hurler, de grimper sur les épaules d'une des personnes présentes autour de moi au moment des faits, ou simplement de vomir, je suis restée neutre, on aurait dit la Suisse, et stoïque. Enfin stoïque pas tout à fait, je me grattais la jambe gauche, membre par lequel les suceurs de sang avaient commencé leur assaut.

Alors maintenant je sais plus trop si j'ai vraiment plus peur des chiens ou si j'ai muté au contact de tant de moustiques, un peu comme le gars dans La Mouche, qui transmute, se voit pousser des ailes et se met à penser comme un insecte..
Mais j'ai bon espoir : l'avenir nous le dira !

dimanche 7 novembre 2010

moustiques, pétrole et propagande

Je rentre d'un job, fatiguée et transformée en piqûre de moustique ambulante. Rien que sur ma main gauche (juste la main, ni le bras et l'avant-bras) je dénombre pas moins de six bosses disgracieuses, qui chatouillent et qui grattouillent, autant que les 23 autres piqûres disséminées sur le reste de l'épave qui me sert de corps.

J'étais de shift de nuit, et j'accompagnais un coéquipier sur son job de promotion au grade supérieur, un petit avant goût de ce qui m'attend bientôt.

Pour passer le temps pendant les périodes où l'on doit rester en stand-by mais où il vaut mieux éviter de dormir pour ne pas sombrer, l'idée folle m'a prise de regarder un film, et pas n'importe lequel, The Hurt Locker, ce film se déroulant durant la guerre en Irak, qui a gagné l'oscar cette année.

Ce film m'a laissée la même impression que Munich il y a quelques années. Cet aigre-doux [Edit: nauséabond, pour mieux vous donner une idée de mon avis qui n'est vraisemblablement pas bien passé à l'écrit] des films qui plaident une cause et en servent une autre.

Ici l'on parle de guerre, et l'on suit donc des personnages de l'armée américaine postée en Irak. Ce sont des démineurs, dépeints, je vous le donne en mille, en valeureux soldats, un peu foufous mais au fond héroïques. Les Irakiens, eux, n'apparaissent que sous forme de silhouettes dans le désert qui mitraillent les soldats américains ; de badauds silencieux aussi tenaces que les mouches du désert et d'autant plus dangereux qu'ils sont proches d'une mosquée ; ou de méchants garnements qui caillassent les tanks de l'US army. Les (nombreuses) répliques prononcées en arabe ne sont à aucun moment sous-titrées, si bien que si l'on ne comprend pas cette langue, on passe à côté de tout ce qui sera dit par les locaux durant le film, ce que je trouve incroyablement dommage (en particulier la scène où une dame chasse un GI de chez elle en le traitant de criminel, mais qui ressemble davantage à une scène d'hystérie sans les sous-titres).

Le seul Irakien rendu attachant par le scénario est un gamin surnommé Bekham qui parle anglais, joue au foot, vend des DVD en tous genres aux GI et les escroque allègrement, et qui fume à même pas 13 ans. Le doute plane un moment sur son meurtre sanglant par des fabricants de bombes artisanales pour des raisons obscures. Charmant portrait.

Bref je suis curieuse de savoir en quoi ce film est anti-guerre, n'y ayant vu pour ma part qu'un apologue à la bravoure de certains citoyens américains et à l'animosité du peuple irakien, qui rappelons-le, s'est vu envahir par l'armée américaine en 2003, sans motif réel (hum hum) démontré à ce jour.

[pas d'image, car la guerre c'est mal]

vendredi 5 novembre 2010

chrysalide

Jeune, je ne savais rien
Jeune, je n'comprenais rien
Un beau jour j'ai changé tout d'un coup


Tout a commencé en avril dernier. Fraîchement débarquée de mon école de super électricité, je découvrais un nouveau monde, celui de la haute technologie et des services pétroliers.
À Clamart, au tech center où j'effectuais mon stage, les immeubles étaient pimpants, les outils flambant neufs, fringants, sophistiqués, bourrés de gadgets technologiques, limite capables de faire ton café. Si tu avais besoin d'une licence pour un logiciel super pointu, qu'à cela ne tienne, tous les moyens étaient mis à ta disposition. Tout fonctionnait bien dans les labos, tu essayais bien les "cas critiques" du terrain, vas y que je lui balance une température de -50degC, s'il survit on est bon. Attends bouge la pression voir.
C'était pas le monde des bisounours, mais on était quand même loin de la réalité du terrain. À des milliers de kilomètres, de facto...

Comment, quand on prend les transports en commun pour aller bosser, qu'on ne se soucie même plus d'arriver en retard quand le RER B fait des siennes, on n'aura qu'à prendre la 4 à la place, et puis de toutes façons on n'a pas vraiment d'horaires fixes, on rentrera plus tard ce soir ; bref comment dans ces conditions peut-on imaginer les galères du terrain.

Comment imaginer que le conducteur du camion, là-bas sur le terrain, va stopper sa course de 14 heures pour décès d'un membre de sa famille, et retarder le job de 6 heures. Comment imaginer que cet outil qui a mis 27 jours à arriver du centre de production, va avoir un filetage bousillé par 400 kilomètres de route cabossée et de vibrations continues d'amplitude variable et aléatoire, et que ce filetage nous obligera à attendre trois jours, le temps d'envoyer une réplique de rechange.
Jusqu'au climat, tous les détails comptent sur le terrain, pouvant nous retarder, nous arrêter ou nous nuire, car le moindre joint que l'on aurait oublié de vérifier peut mener à une catastrophe écologique à l'échelle de la planète.

Prendre conscience des conditions réelles, dans la vraie vie du terrain, celle où le sol est une mélasse de 1 mètre moins le quart de profondeur, où des vaches viennent dormir autour du rig, où des chiens (quand ce ne sont pas des jaguars) squattent allègrement parce qu'ils sont nourris des restes alimentaires des employés, voici l'un des objets du programme Tech and Field. En arrivant, je restais béate face aux conditions presque préhistoriques, du moins en comparaison du centre technologique, dans lesquelles tout semblait se passer ici. Et à présent, ou plutôt il y a dix jours, j'expliquais à mon futur collègue venus d'Oxford pourquoi le logiciel qu'il nous proposait n'était que d'une utilité relative pour notre location, alors que jusque mars j'habitais en Abstraction, là où règnent les axiomes et les récurrences...

Comme quoi les miracles existent !