"Me tenant comme je suis, un pied dans un pays et l'autre en un autre, je trouve ma condition très heureuse, en ce qu'elle est libre." - R. Descartes

jeudi 30 septembre 2010

Update

Un ptit coucou de l aeroport de Bogota.
Je suis arrivee ici hier, il faisait moche, comme souvent ici (temps gris et pluie), mais dans quelques heures le climat devrait etre bien different ! Vous ne savez pas encore ou je vais. Bon je peux (presque vous le dire) : la mon avion s envole pour Miami. Et ce n est pas ma destination finale !!

Bisous bisous et a bientot !

mercredi 29 septembre 2010

Congé !

J'interromps mon récit sans fin pour revenir à des choses plus concrètes : je suis "envoyée en congé".
Peut-être ai-je omis de le mentionner, notre rotation a changé ici et je bénéficie maintenant de 7 jours de congé tous les 21 jours travaillés (avant c'était 6 jours pour 24). Ces jours, on ne peut pas vraiment les choisir, ils dépendent de l'activité, et aussi d'un ordre de rotation. Bref là j'ai appris lundi que demain c'est mon tour, même si je savais depuis un moment que mes congés étaient imminents (sans jusque là avoir de date fixe cependant).

Le gros souci c'est de trouver que faire de ce temps libre, et avec qui ! Ça peut paraître absurde, mais quand on y réfléchit, être en terre étrangère en vacances seul, c'est pas spécialement ce qu'il y a de plus sympa. J'ai sondé les gens autour pour voir qui serait susceptible d'être aussi en congé, pour aller voir à quoi ressemble les Caraïbes, ou autre chose. Mais comme on travaille tous dans la même boîte, on est soumis aux mêmes aléas des congés, et je ne sais toujours pas qui serait en mesure de se joindre à un tel périple !

Bref tout ça pour dire qu'en cette fin d'après-midi j'ai arrêté de tergiverser, pris une décision, sondé les intéressés, et acheté mes billets d'avion. Demain après-midi, je retourne à Bogotà, et pour la suite, vous verrez bien, inchallah ;-)

dimanche 26 septembre 2010

Un soupçon d'ici (2)

[suite de ce message]

En entendant le nom de notre hôte de ce soir, les passants nous indiquent sans hésiter une direction. Un GPS n'en aurait pas fait autant.


La casa de notre ami est petite, mais cossue. C'est la maison de la mama, un savant mélange de passé et de présent, de moderne et de désuet, un joyeux gourbi plein de couleurs et de convivialité, qui ne doit d'être confortable et toujours debout qu'au climat clément de la région.
Les murs sont en briques rouges, de l'extérieur comme de l'intérieur, semblables au jour où ils ont été bâtis. D'ailleurs les briques qui serviront sans doute à achever la construction sont disposées dans deux coins de la pièce principale, en piles plutôt larges et à hauteur de coude, formant des meubles de fortune. Une tôle ondulée fait office de toit. Aux murs sont accrochés des photos d'enfants, deux casques de moto et le gilet orange fluo serti du numéro d'immatriculation du bolide qui va de pair, un casque de vélo, un miroir rectangulaire un peu usé, que l'on dirait sorti d'un film en noir et blanc.

Sur le meuble de fortune, en retrait, on distingue un mini PC portable qui joue des tubes colombiens, et une autre photo d'enfant, au milieu d'un cadre aux finitions approximatives, en bambou, tel que ces cadeaux que l'on nous fait confectionner à l'école primaire pour la fête des mères, que notre maman garde toute sa vie plus pour nous faire plaisir que pour la valeur artistique ajoutée à la décoration de son intérieur. Trônent aussi des objets aléatoires tels qu'un bloc note, quelques crayons, et quatre gros cylindres de bambou, percés de trous à diverses hauteurs, comme s'il s'agissait d'instruments à vent. J'apprendrai plus tard qu'il s'agit d'un prototype de chaise en bambou, dont notre hôte a lui-même dessiné le modèle, car il a pour projet de monter sa boîte de confection de meubles originaux en bambou. Il a déjà commencé avec d'autres objets, expliquera-t-il en brandissant le cadre dont l'arrière a été coupé dans du carton, et qui reposait en fait sur la table non sur un pied, qui n'a pas encore été taillé, mais en équilibre sur deux tiges métalliques recouvertes de plastique vert.

Cette pile de briques fait triple emploi puisqu'elle marque également la séparation entre la pièce principale et le coin cuisine. Sur une table siègent quelques marmites, tandis que d'autres ustensiles pendent au mur : à côté de la râpeuse kitsch vert fluo, la cuiller grand format en téflon et le marteau pilon traditionnel en bois. Sur une autre table placée à angle droit, a été installée la gazinière, une double-plaque électrique de camping, sur laquelle deux poêles cuisent déjà le dîner de ce soir, une en téflon et une sans manche, noire de graisse et pleine d'huile, cette juxtaposition résumant parfaitement le mariage cavalier des tendances, époques et moyens de ce home sweet home colombien.

Ne cherchez pas l'évier, il est dehors, ainsi que les sanitaires et la douche, dans la petite cour derrière la maison. C'est là que vit aussi la poule domestique, chagrine depuis le suicide de sa sœur, par obésité volontaire. Le deuil ne l'empêche pas de manger cela dit, elle est d'ailleurs en bonne passe de rejoindre sa frangine au paradis des cocottes, nous dit le maître des lieux.

[à suivre]

samedi 25 septembre 2010

Un soupçon d'ici (1)

Aujourd'hui je souhaite vous plonger dans ce pays qu'est la Colombie, juste le temps d'une escapade, histoire de partager avec vous un peu de cette culture qui m'entoure, de ce que je vois, perçois et ressens, à défaut de vous la faire découvrir en vrai (avis aux amateurs je devrais avoir la première semaine d'octobre de libre, si voulez la version 3D de ce post, c'est l'occasion !).

D'abord fermez les yeux, et oubliez ce qui vous entoure. Le bureau, le boulot, le bruit des collègues autour, la maison, la grisaille. Exit. Tout est noir à présent autour de vous et silencieux.

Une musique se fraie un chemin jusque vos oreilles...


D'abord les percussions et leur son rythmé et régulier. Pi-pa-poum-poum Pi-pa-poum-poum-paf (bis) Puis à cette toile de fond se mêlent tour à tour les trompettes et les cordes. La voix du chanteur retentit à son tour, sonnant comme un instrument de musique à part entière, qui lie le tout dans cet air de salsa qui semble venu tout droit du bord de mer.

De mer il n'y en a point. Pourtant dans l'air règne cette langueur propre aux stations balnéaires, cette chaleur moite et presque salée. Seules l'odeur de l'iode et la brise marine manquent, et leur absence nous rappelle que nous sommes au milieu des terres. Tierra caliente on dit ici, pour se référer au climat, puisqu'il n'y a pas vraiment de saisons auxquelles se rattacher.

On ouvre les yeux, dans un taxi local, sans compteur mais avec un indicateur de vitesse, avec ceinture de sécurité à l'arrière mais sans point pour la boucler. Il passe devant quelques boutiques : une épicerie digne de mes souvenirs balnéaires tunisiens, avec des bouées et des dauphins gonflables en devanture ; quelques restaurants où l'on peut distinguer le ketchup et la mayonnaise sur les tables des clients, non dans les bouteilles aux formes traditionnelles, mais dans ces pochettes molles typiques ici, ces recharges économiques et supposément écologiques, pareilles à une brique de lait dont on aurait déplié les rebords pour en retirer le volume, dans une matière entre aluminium et plastique et dont le bouchon se visse dans le coin. On voit d'autres restaurants maintenant, avec de grandes poêles occupées à frire veau, vache, cochon, couvée.

On tourne dans une petite rue, on s'éloigne de la grande artère et des devantures, pour se retrouver au milieu des riverains, qui annexent allègrement la rue à leurs domiciles. Pas sûrs de l'adresse exacte, nous voilà interrogeant les passants, qui n'y comprennent rien, soit pas plus que nous, à cette histoire de transversales, diagonales, carreras et autres numéros des rues de leur quartier, construit au petit bonheur la chance, vraisemblablement sans plan ni cadastre. "Vous cherchez qui ?"

[à suivre]

mercredi 22 septembre 2010

Un an déjà !

Il y a un an jour pour jour, j'étais assise devant un PC, à Paris, en train de rédiger le premier article de ce blog que vous lisez. Je rentrais du Royaume-Uni où je venais de passer mon dernier entretien pour le métier que j'exerce aujourd'hui ! Dehors il pleuvait, c'était le début de l'automne et du temps gris.

Je rêvais d'avoir un casque pour Noël, de partir loin, j'appréhendais les nuits blanches et les responsabilités, je ne savais de ce métier que ce que m'en avaient dit les gens qui l'exerçaient que j'avais rencontrés : beaucoup de boulot, peu de sommeil, mais un nombre de films au compteur imbattable.


Aujourd'hui, je suis devant un autre PC, en Colombie. Dehors il fait chaud, et il pleut de moins en moins, on entre peu à peu dans la saison sèche je crois, et j'en suis à mon dixième mois de beau temps consécutif, je le sens de l'intérieur, et je crois que ça se voit à l'extérieur !

Si je travaille depuis à peine plus de sept mois, je pense quand même déjà pouvoir faire la part des choses, et ce qui est sûr, c'est que l'on ne m'avait pas menti ! Du boulot il y en a, même si je trouve que je ne vais pas sur le terrain autant que je le souhaiterais (mais ça, ça dépend de l'activité). Du sommeil, quand je suis sur le terrain, j'en manque, même si le reste du temps je peux dormir correctement - bien que le réveil à 6h30 soit quelque chose qui psychologiquement me fait énormément souffrir. Enfin je n'ai pas vu beaucoup de films ici, et encore moins lorsque je suis sur le terrain. Je suppose que cela dépend du segment dans lequel on travaille, car mes amis qui forent, eux, passent en effet leur vie à regarder des films (pendant qu'ils forent justement).

Du reste être une fille sur le terrain est singulièrement plus facile qu'on ne me l'avait dit. Cela, j'en suis sûre, dépend aussi du pays où l'on est et de l'équipe.



Je pense donc pouvoir affirmer, un an plus tard, que je ne regrette pas mon choix, et je remercie qui de droit d'avoir exaucé mon vœu. En plus je pense avoir eu beaucoup de chance, que ce soit le segment au sein duquel je travaille, le pays où je vis, ou l'équipe avec laquelle je partage mes journées. Toujours est-il que je suis heureuse le matin en me levant, et pleine de gratitude tous les soirs en me couchant.
Je n'ai pas eu mon casque blanc pour Noël dernier, mais il semble que ce soit prévu pour cet hiver. Si tout se passe bien il fera beau, et je serai sur le terrain !

Joyeux anniversaire S Comme...

samedi 18 septembre 2010

Going social

Quand je suis arrivée à Barranca, dans ma tête je m'échouais dans la ville la plus paumée du monde habité, et rien ne me donnait envie de partager ma frange de temps libre, déjà trop mince à mon goût - puisque je n'ai pas de weekend, avec des collègues de la base. Et pour une raison que je ne saurais m'expliquer, tout me poussait à m'isoler, et à parler ou sourire le moins possible.

Exit donc la personne que vous connaissiez en Tunisie ou en France, ici à Barranca j'étais plus terne que l'ombre de moi-même. Je portais en permanence ce masque que peu d'entre vous connaissent, qui m'accompagnait à l'époque dans les transports en commun en Tunisie (ou dans la rue, passée une certaine heure) : yeux rivés au sol, traits fermés, yeux froncés. Je m'efforçais de passer le plus inaperçu possible, de me déplacer furtivement et de ne saluer personne. Alors que j'étais souvent celle qui organisait les sorties, et qui proposait régulièrement des événements socio-culturels dans ma vie précédente, ici je m'appliquais à refuser systématiquement les invitations de ma colocataire, en créant le premier précédent la veille de mon départ pour la school, en juin dernier (souvenez-vous).

Or depuis mon retour ici, je me fais peu à peu à l'idée que Barranca est mon assignation géographique, et ne rêve plus spécialement de retourner à Bogota, même si je serais ravie de le faire, pour retrouver mes colocataires, qui ont fait l'acquisition d'une wii après mon départ, et retrouver cette belle ville et les amis que j'y ai laissés.

Je m'intègre donc peu à peu à la vie en société ici, ce qui laisse entendre que j'ai adouci mon comportement ; cela m'a d'ailleurs valu cette récente confidence sur ma manière d'être, comme quoie j'étais "féroce" auparavant, même si je préfère croire que j'étais "juste" farouche (ce qui n'est déjà pas anodin) et que du reste je le demeure.


Néanmoins, je fais des efforts. Maintenant je salue les gens que je croise à la base, même si je ne les connais pas, et même si du coup je dois les saluer une bonne quinzaine de fois par jour à présent, vu que (cf. article précédent) j'ai la mémoire vive de Dori du monde de Nemo. Autre pas en avant, je déjeune et discute avec des gens autres que ceux strictement de mon segment. Non que j'étais sectaire, mais avant l'occasion ne s'était présentée que très rarement. Maintenant je m'efforce d'assister aux événements mondains de la vie de la base, et me suis même laissée enrôler dans l'équipe de volley ball !

Bref je redeviens moi même, c'est plutôt bon signe non ?

mercredi 15 septembre 2010

Quatre

C'est le nombre de cases de mémoire vive qu'il me reste. Parce que depuis que je dois communiquer en espagnol en temps réel, mon cerveau a réquisitionné de force tous mes clusters inactifs (et les autres) pour leur assigner des nouveaux mots, et a empiété sur la ram.

Alors maintenant impossible pour moi de retenir aucune combinaison de plus de quatre éléments ni, fait plus notable, aucun numéro de plus de quatre chiffres.

Le code d'entrée d'un immeuble : raté. C'est pas très grave, ici il n'existe pas de codes d'entrée, tout marche aux vigiles flanqués à l'entrée des immeubles qui reconnaissent les visages des locataires et surtout des intrus.

Mon numéro de carte de séjour : encore raté. Là c'est un peu plus gênant, même si on dirait pas comme ça, mais en fait ici le numéro de cédula, ou cédula extranjera pour nous, est comme un sésame qu'on te demande trois cent douze fois par jour. À la caisse du supermarché comme au restau ou lors d'une formation de survie aux incendies, ce numéro de six chiffres est la réponse à tous les problèmes de la vie quotidienne, et croyez-moi, si vous avez le malheur d'utiliser votre carte comme antisèche, non seulement ça se verra mais en plus ce sera du plus mauvais effet sur votre crédibilité. Imaginez ce que vous penseriez de quelqu'un qui regarde sa carte d'identité pour vous donner sa date de naissance... Eh bien ici c'est pareil pour le numéro "d'immatriculation" de chaque individu. Donc non seulement j'ai l'air d'une étrangère un peu cruche sur les bords (ou sourde, ou les deux), mais en plus j'ai l'air d'avoir usurpé l'identité d'une autre. Jolie réputation !


Mon numéro de téléphone : GROS FAIIIIIIL.
Pour les Colombiens, il existe un numéro plus important que tous les numéros de cédula réunis, il s'agit de celui qui fait que l'on a une vie sociale, le numéro de téléphone portable, voire les numéros, car ici il n'est pas improbable d'avoir autant de portables qu'il existe d'opérateurs, pour bénéficier de toutes les offres alléchantes du marché et surconsommer à souhait. Le téléphone est comme je le disais une condition sine qua non à la vie en société sur place. Il règne ici une paresse de la planification telle que le portable apparaît comme la seule option viable. On fait quoi ce soir ? Je t'appelle. Trucson est à l'étage ? Attends je l'appelle. J'ai faim - Viens on appelle pour se faire livrer. Si j'ai un problème sur le puits je t'appelle.
Ça c'est le "caller side", pas fondamentalement différent en Europe, quoique : ici, les gens ont banni l'usage des textos, par paresse ou incommodité, je ne sais pas trop, disons plutôt par coutume locale.

Mais ici il y a aussi le "called side", déjà plus banal pour ma partition Tunisienne, et franchement incongru pour l'Européenne qui sommeille en moi. Il s'agit de cette tendance (je pencherais plutôt pour le terme "manie") à systématiquement répondre au téléphone, en toutes circonstances, comme s'il s'agissait d'une question de vie ou de mort.
Dit comme ça, ça peut paraître normal, de répondre au téléphone quand il sonne. Oui, j'en conviens.
Mais alors que d'autres s'abstiendraient, les Colombiens répondent quand même :
- quand ils sont en pleine activité physique, genre une main en train de visser un écrou et l'autre en train de maintenir l'outil auquel on visse l'écrou. Pour ceux qui n'arrivent pas à visualiser le téléphone, un indice : les colombiens n'utilisent pas de kit main libre, et ont l'épaule droite franchement excentrée.
- quand ils sont en pleine réunion exceptionnelle avec toute leur hiérarchie (n+i avec i variant entre 1 et N, N étant supérieur strictement à 2)
- quand ils sont sur la route. Lors d'une réunion de sécurité, le gars qui faisait une sensibilisation sur les dangers d'appeler au volant implorait presque l'audience de s'arrêter pour recevoir des appels. Et les gens de se plaindre que ce n'est pas toujours possible de s'arrêter, et que parfois ça dérange plus qu'autre chose ; j'ai timidement tenté de proposer l'alternative où on ne s'arrête ni ne décélère "les gars, juste, répondez pas, ça MARCHE !" mais le son a pas voulu sortir de ma gorge pour des raisons encore obscures.
- quand ils sont aux petit coin. Sans commentaire.

lundi 13 septembre 2010

Nouvelle routine

Mon quotidien en ce moment s'est sensiblement modifié.

Depuis mon retour, je passe plus de temps sur le terrain, où l'activité a repris. J'en suis à 1 job par semaine soit 3-4 jours sur puits par semaine. Ils ne sont pas très loin, ce qui me permet de faire la navette.

J'ai le pot de toujours tomber sur le même "rig", comprendre par là les installations fixes (derrick, containers et autres équipements d'alimentation) et le "rig crew", c'est-à-dire mes potos, ceux qui font entrer les tuyaux dans le puits et qui régulièrement me racontent leur vie, surtout que maintenant ils me croisent fréquemment ! Ah oui, j'omets de préciser que ce rig est réputé être le meilleur d'Amérique du Sud, genre les gars te descendent 34 tubes par heure avec des pointes à 56 les bons jours.

C'est donc le même rig à chaque fois, et maintenant du coup je ne confonds plus le container du company-man et celui de la cafet (nb il n'y a pas de nourriture dans la cafet, c'est juste un container avec la clim des chaises et des tables). Y a quand même un truc qui évolue à chaque fois, c'est la population canine. Leur mode de reproduction relève de la mitose selon moi parce qu'ils étaient 2 y a deux mois, 4 y a une semaine, et sont maintenant 27,4. La partie décimale est pour le ptit chien-rat qui court et aboie partout, et la partie entière, pour la meute d'autres énormes cerbères qui sont "inoffensifs", me rabâche-t-on... Oui sauf que le chien-rat passe sont temps à les exciter en essayant de les mordre ou de jouer à saute-moutons sans leur demander avant, puis il les lâche sur moi et ça donne lieu à des scènes d'humiliation personnelle à propos desquelles je ne m'épancherai pas davantage ici, sous les yeux incrédules de mes "potos" qui au lieu de chasser les clebards crient de loin "t'inquiète ils sont inoffensifs". Je suis toujours intimement convaincue que les chiens sont des mangeurs de femmes et pour preuve : où sont passées les autres membres du sexe faible sur ce foutu rig ?!


Et puis il y a les siestes-éclair dans le pick-up. La bouche ouverte, des lunettes de soleil en guise de masque anti-projo, la tête renversée parce qu'il n'y a pas de coussin, les pieds tordus, les bras tordus, le cou tordu, les ronflements intempestifs du coéquipier, le bruit du moteur, la clim' à fond qui te congèle parce que le sang coule naturellement à 34 degC dans tes veines (c'est d'ailleurs pourquoi tu ne transpires jamais), l'odeur de la nourriture qui envahit peu à peu le pick-up, les boîtes en cartons qui traînent un peu partout, les pochettes de jus et autres paquets de chips.
Qui dit sieste-éclair dit longues nuits de travail, et dit surtout sommeil retardé, voire annulé, comme les RER B les jours de grève. Alors l'humeur elle aussi est comme les jours de grève, au début. Mais avec le temps, à la fatigue mentale s'ajoute la lassitude physique, celle qui fait que tu sens le poids de tes bras, que tu ris de tout et de rien, que tu n'as plus ni la force de marcher, ni celle de manger, ni parfois même de dormir.



Sur ce je vais aller compter les moutons !

mardi 7 septembre 2010

Quand la musique est bonne

J'ai sans doute déjà parlé du vallenato, ce doux son d'accordéon mené par une voix mi-crécelle mi-hippopotame-en-rut.

Il n'est jamais de trop d'en remettre une couche. D'autant que mes coéquipiers se sont mis en tête de jouer les mécènes. Une petite explication s'impose.

Le vallenato, c'est LE style musical par excellence en Colombie. Cette musique, bien que venant de la côte, enchante aussi bien paisas (les gens du terroir) que costeños (ceux des régions côtières des Caraïbes) avec des chansons à texte, sans s, parce que je ne suis pas sûre qu'il change d'une chanson à l'autre. Les chanteurs sont plutôt connus localement, mais ne roulent pas sur l'or pour autant. Ils sont organisés en troupes, qui peuvent être invitées aux événements sociaux de la vie quotidienne.

Un jour par exemple, plus précisément la dernière fois que j'étais allée sur un puits en juin, mes coéquipiers ont payé une troupe, pour venir, vers minuit, exécuter un live, à la staff house, de ce que nous écoutions en boucle à l'atelier. True Story [même si la photo n'est pas contractuelle].

Aujourd'hui ces mêmes coéquipiers vont plus loin. Leur nouveau projet et de soutenir financièrement une troupe. Moi ça m'a pas spécialement parlé, alors j'ai demandé des détails. Ils m'ont répondu ce qui suit.

Le principe est simple : tu leur donnes des sous et eux ils te dédient une chanson. Dit comme ça, oui ça paraît simple. Moi dans ma tête tu leur donnes de quoi s'acheter un sandwich et avant de chanter au mariage de Jaime et Rosis ils disent merci à bibi et ils enchaînent.

En fait non. Le principe, certes simple, est quand même plus évolué, n'oublions pas que le vallenato c'est la musique du pays. Donc en fait l'hommage il se fait en studio, au moment d'enregistrer la chanson, plus précisément pendant la chanson, généralement au tout début, en guise d'intro. L'hommage devient alors indélébile, le mécène rentre dans l'histoire du vallenato, et pour peu que la chanson ait du succès, il est propulsé star nationale par alliance, pour l'éternité.
Forcément, le chèque gracieusement offert par le mécène doit être à la hauteur de la récompense. Il s'agit généralement de plusieurs centaines de milliers de pesos, soit plusieurs centaines d'euros quand même...


Là mes coéquipiers sont partis sur une base de 500$ pour faire dire "al equipo de complicación de barrraaaaaanca" ce qui veut dire en gros "big up à la team Complicayshieun live from Barranca wesh wesh" [parce que complishieun, le nom de notre segment, ça sonnait trop dur à faire répéter par le chanteur.]


Enfin bref, pour vous faire patienter en attendant l’œuvre qu'on aura financée [qu'ils auront, moi j'ai dit que je payerais seulement en échange de la reconversion du chanteur en berger muet en charge de lamas péruviens], je vous renvoie vers le top 15 local, histoire de vous mettre au goût du jour !

lundi 6 septembre 2010

Eso es Kolombia

Les a priori ont la vie dure.

Flash-back, fin Août, à Paris.

J'étais avec des connaissances, en train de répondre aux questions typiques que l'on me pose quand on apprend que je vis en Colombie : Ingrid, drogue et kidnapping. Hé ho relax, la Colombie c'est tranquilou, pépère, chevere que je réponds, exagérant à souhait pour les faire taire parce que sinon je sentais qu'on allait entrer dans un débat en cul-de-sac du genre "Twix ou Snickers". Je leur ai dit que je ne m'étais jamais sentie menacée dans la rue, ou tout du moins jamais plus qu'ailleurs sur la planète. Car, pour ceux qui l'ignorent encore, je suis une flippée de la vie, et je m'imagine déjà la tête fracassée contre le bitume baignant dans un mélange de cervelle, de sang et de bouts de chair avec quelques éclats d'os parsemés ici et là, chaque fois que quelqu'un qui marche dans l'autre direction sur le trottoir met la main à la poche. Ah oui et je suis une grande fan de Dexter, ça alimente mon imagination...

Alors retour au monde réel, et là, en réponse à ça, j'ai eu droit à une belle pèche : "A oué ? b1 ptet k c paske tu fè pa etrangR lol xptdr"

Le gars, ni une ni deux, il me lâche ça texto, enfin à l'oral - mais j'ai cru bon de le retranscrire en mode T9-kikoo-lol parce que ça a tendance à mieux faire passer la bêtise.

Mec, t'as cru que les Colombiens avaient des têtes d'arabes ?! Ou alors peut-être que Colombie, Chili, Arabie, Tunisie, tout ça ça se finit en -I donc les gens doivent se ressembler, pareil ?

Bref et quand je lui ai dit que non, les Colombiens n'avaient pas plus des têtes d'Arabes que des têtes d'incas, genre le sorcier dans Les Sept Boules de cristal, il est tombé des nues. Quand j'ai ajouté qu'il y avait d'ailleurs pas mal de gens très blancs de peau, et pas mal de blonds, là il a cru que je me foutais de lui... Et pourtant non.

De la même façon, les Africains ne sont pas tous noirs, comme mes compadres colombiens se plaisent à le croire. Aujourd'hui encore j'ai eu droit à des yeux ronds d'un collègue incrédule quant à mon africanité.


Bref, les a priori ont la vie dure.

Merci Benetton...

dimanche 5 septembre 2010

Des souris et des hommes

Je crois que y a des souris qui vivent ici.


Des souris, ma HANTISE.

Bon je les ai pas encore entendu couiner, mais j'ai des preuves solides. Et puis ce n'est pas de petites souris genre inoffensives dont il s'agit, même si, si vous voulez mon avis, les souris ne sont jamais inoffensives, non, mais plutôt d'espèces de monstres voraces qui ont dû muter des suites de contaminations diverses à force de boire l'eau du Rio Magdalena, qui comme chacun sait, recueille allègrement les déchets de la raffinerie du coin depuis des temps immémoriaux.

Mais revenons-en aux souris, et aux preuves.

D'abord il y a eu le frigo. Chaque fois que j'y entrepose des trucs, ben ils disparaissent. Mais genre brusquement, clairement comme si une famille de souris les avaient bouffés. Des tranches de poulet, une brique de lait, du pain. Oui vous devez croire que je suis folle de mettre mon pain au frais. Eh bien figurez-vous que déjà je ne le laissais plus dehors à cause des fourmis qui rôdaient. Là j'arrive à cours d'imagination,

Mais il y a plus troublant. Je crois qu'elles crèvent la dalle ces souris, genre sous-nutrition, parce qu'en une après-midi, elles se sont tapé une pile de fringues posées sur mon lit. Genre une pile de 15 fringues quand même, et PROPRE, attention elles allaient pas s'intoxiquer en mangeant des habits venant droit d'un puits.

Alors j'ai un peu pitié, je pense à leur acheter un énorme fromage, histoire de les réhabiliter dans le monde des souris qui ne s'en prennent pas à des vêtements 73% acrylique - 17% nylon, y a de quoi y laisser sa rate.

Ou alors y aller à la Full Metal Jacket et les massacrer toutes, une à une, et les regarder mourir dans une agonie aussi lente que sanglante. Après tout s'il faut choisir entre une horde de souris affamée et une pile de mes T-shirts dont chacun recèle une précieuse histoire, je ne vais pas longtemps hésiter.

Ou, dernière option... En fait non, il n'y a pas d'autre option. Je vais bouffer des miettes et des fourmis, et me vêtir de mon coverall noir de boue, en attendant de fomenter un plan solide, et de me racheter à manger, à boire et à porter.

samedi 4 septembre 2010

Message à caractère informatif

Juste une petite note pour vous signaler que je suis toujours vivante, que j'ai fini mon job mais y ai perdu le peu d'horloge interne qu'il me restait, à coup de siestes de 30 minutes sur un siège passager de camionnette. Je n'ai plus de notion du jour ni de la nuit, et ai faim en permanence. Mais je suis bien vivante.

C'est difficile de se couper du monde à nouveau, je me rends compte à présent que la dernière fois je m'en étais accommodée. Là il faut tout recommencer...


Sur ce je vais aller faire une sieste. Choubidous les boudinous.