"Me tenant comme je suis, un pied dans un pays et l'autre en un autre, je trouve ma condition très heureuse, en ce qu'elle est libre." - R. Descartes

samedi 14 mai 2011

Mon rêve familier (à moi)

La nuit, quand je n'ai rien d'autre à faire que d'attendre que le soleil se lève pour aller me coucher, plein d'idées me traversent l'esprit, de choses à écrire, à raconter. Puis je dors, et j'oublie. Ou peut-être que la nuit quand je suis très fatiguée, je pense avoir des idées, je ne suis plus sûre.

J'écoute de la musique aussi, en regardant les paysages. Parfois c'est de la musique "d'avant", qui me fait repenser à "avant", et face à l'incongruité de la situation, d'être dans un pick-up au bord du Rio Magdalena sur un puits de pétrole au fin fond de Cantagallo, Colombie, dans un décor digne d'une contre-utopie, entre le mouvement continu des pompes mécaniques qui extirpent inlassablement le pétrole des entrailles de la terre, et l'ombre menaçante des rigs, décor bercé des ronronnements de moteurs et autres cliquetis mécaniques inquiétants, et d'écouter de la musique confortable qui me fasse penser à mes amis, à Paris (ou ailleurs).

J'ai envie de graver ces jours dans ma tête, de m'en souvenir à jamais comme de l'époque où j'ai quitté le monde "réel" des gens qui vivent leur vie normalement, pour celui de ceux qui vivent pour travailler dans l'ombre et pour que ces-premiers puissent mener leur existence en tout confort sans jamais penser à ceux qui suent à eau et parfois à sang pour faire marcher le système. Ici je côtoie les mineurs des temps modernes, sous-payés et exploités, et j'ai appris plus en 15 mois sur la vie qu'en un quart de siècle préalable.

Comment vivre en voyant au quotidien des gens qui travaillent plus que soi, à des besognes ingrates et sous-payées, quand on sait qu'ils sont parfois malades ou bien assez vieux pour être à la retraite. Je n'ai pas de réponse à cette question et j'en viens à envier ceux qui sont loin et n'en savent rien. Au lieu de réfléchir, je me cale dans la camionnette, j'allume mon lecteur et je me laisse porter loin d'ici, dans un monde qui d'ici a l'air imaginaire.

***

C'est l'histoire d'un Australien qui travaille en Inde, qui discute avec une Belgo-Tunisienne qui travaille en Colombie, ça s'invente pas. L'Aussie est un "Music Mate", une personne qui, malgré une vie et un bagage culturel sensiblement différents, se trouve avoir les mêmes goûts musicaux que moi, goûts incluant de la musique qui ne sera sans doute jamais connue ni reconnue à sa juste valeur (exemple) mais qui trouve son public à travers le monde.

Il y a près de trois semaines, cet ami me demandait si j'avais fait de nouvelles découvertes récemment. C'est là que j'ai réalisé que depuis des mois j'avais arrêté d'écouter de la musique. Et depuis des mois aussi je perdais ma bonne humeur, ma joie de vivre. De la poule ou de l'oeuf, je n'ai pas vraiment cherché qui était qui. À la place je me suis remise à jour côté discographie, et me remets à écouter des titres "bonne humeur". La musique que je préfère est celle qui me semble familière, comme l'inconnue de cet autre, qui n'est chaque fois ni tout à fait la même ni tout à fait une autre. Cette musique qui me suit à travers les années, les pays, les périples, m'accompagne pour le meilleur et pour le pire toujours fidèle et compréhensive.
Je ferme les yeux et me laisse bercer, "et, pour sa voix, lointaine, et calme, et grave, elle a l'inflexion des voix chères qui se sont tues".


3 commentaires:

  1. Va falloir un bon talkie walkie pour communiquer jusqu'en inde :p !

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  2. si j'avais besoin de talkie walkie pour garder contact avec mes amis à travers le monde, je me sentirais déjà esseulée depuis des années !

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  3. Je suis bien d'accord. On se comprend.

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