"Me tenant comme je suis, un pied dans un pays et l'autre en un autre, je trouve ma condition très heureuse, en ce qu'elle est libre." - R. Descartes

dimanche 21 octobre 2018

Mon petit cahier d'écriture

Je ne sais plus d'où m'est venue cette idée. Un faisceau de références je dirais : un ami qui avait évoqué le concept, un article dans un magazine, une bloggueuse que je lis.

Les journaux intimes, tout le monde connaît. Les blogs aussi.
Mais ce n'est pas ce dont il est question ici.

Je parle ici de s'écrire à soi. Ou pour soi. Écrire en partant du postulat que ce que l'on écrit ne sera jamais lu par personne d'autre. Écrire alors comme on penserait, sans contrainte des phrases, de l'orthographe, de la linéarité, du sens. Écrire comme ça nous vient et ce qui nous vient.

En mai j'ai commencé à faire cela. J'ai soigneusement choisi un de ces cahiers aux pages très lisses et un stylo qui glisse, pour rendre la tâche plus facile, pour ne pas me créér de prétexte de ne pas écrire dedans - il fallait que ce soit agréable, pas une corvée. C'est un cahier "comme ceux des lycéens dans les films" car j'étais en voyage aux États-Unis quand cette soudaine pulsion m'a prise. Le papier et la couverture me plaisent tant que maintenant je me demande comment je ferai une fois ce cahier terminé !

Écrire sur du papier fait partie de l'expérience. On se laisse porter par l'encre, on rature si on change d'avis, et on laisse libre cours à son imagination. On passe du texte aux listes voire au dessin, on peut ajouter des flêches, des notes de bas de page, mixer les langues, ce qu'on veut comme on veut. C'est le cahier de la liberté !

Pourquoi j'écris ?
Pour regarder au fond de moi, observer ce que j'y vois. Je m'attache davantage à écrire mes observations, mes sensations, qu'à les analyser ou les juger. C'est un peu le même principe que certains exercices de méditation en pleine conscience comme par exemple - fermer les yeux et sentir le contact de son corps sur le sol ou la chaise, et ensuite scanner son corps de l'intérieur et percevoir les petits malaises physiques, sans chercher à les changer, juste pour en prendre conscience.
Je fais pareil, avec les malaises de mon âme. Sauf que je note tout, comme ça me vient.


Qu'est-ce que j'écris ?
Parfois l'inspiration vient d'elle-même. Parfois je joue avec de petits exercices que je m'invente. Inventorier toutes les sources de honte aussi loin que je m'en souvienne, sans les analyser ni les juger. Ou bien réfléchir à ce qui, enfant, me caractérisait ou me faisait rêver, pour essayer de toucher du doigt mon authenticité, ma marque de fabrique, que l'on perd parfois en chemin.
Les premières lignes du cahier ont été pénibles, parce que j'avais perdu l'habitude d'écrire en général et aussi parce que je n'avais jamais écrit pour moi uniquement. Même, petite, quand j'écrivais un journal intime, je me plaisais à croire que cet ouvrage finirait sans doute par être publié (!) et que je devais à mes futurs lecteurs d'être organisée pour les aider à suivre le fil de mes pensées.


À quoi ça me sert ?
Dans un premier temps, à prendre davantange conscience de la personne qui me regarde dans un miroir. Ça m'aide à apprendre à la connaître comme une personne extérieure. On est souvent plus indulgent avec les personnes extérieures que l'on ne l'est avec soi-même. Alors ça m'aide à faire la paix avec elle, et à poser un regard plus bienveillant sur elle, mieux l'apprécier et même à trouver (certains de) ses défauts touchants plutôt que culpabilisants.
Dans un deuxième temps, de même que la méditation, ça entraîne mon cerveau à être plus attentif en général, et plus vigilant vis-à-vis de ce qui ne va pas, en particulier. Le cerveau a une capacité à s'auto-réguler de manière subconsciente que l'on ignore bien trop souvent (lapallissade, bonjour !). Mais pour que cette auto-régulation soit possible, il faut que le cerveau soit conscient des problèmes à réguler. L'exercice d'écriture améliore cette faculté à prendre conscience de ce qui ne va pas.
Je trouve cela génial, de me dire que je n'ai pas besoin de réfléchir consciemment à des solutions, qu'il me suffit en fait de mettre le doigt sur un problème, d'être capable de le verbaliser et de le conceptualiser, pour que mon cerveau puisse faire le reste "en veille", sans mobiliser toutes mes facultés cognitives.
Vous en avez certainement déjà fait l'expérience vous-mêmes. Moi je me souviens de problèmes de maths ou de programmation auxquels je pouvais passer la journée à réfléchir sans trouver de solution, puis il suffisait que je les mette de côté et que j'en fasse abstraction (en me concentrant sur autre chose) pour me réveiller au milieu de la nuit en mode "Eureka" ! C'est un sentiment que vous avez peut-être aussi expérimenté si vous travaillez avec une équipe : il suffit souvent d'aider les membres de son équipe à verbaliser un problème pour qu'ils en trouvent eux-mêmes la solution.
Là, c'est pareil !
De nombreuses résolutions de ces derniers mois sont nées en partie de cette pratique. C'est par exemple suite à cet exercice que je me suis remise à blogger.

Parfois des semaines peuvent s'écouler sans que je ne ressente le besoin ou l'envie d'écrire quoi que ce soit. Puis par accoups je peux passer des heures plongée dans mon cahier et en perdre la notion du temps, comme un spéléologue qui explorerait une nouvelle grotte.
J'en sors toujours plus légère et comme soulagée.


Et vous ? Vous connaissez ? Vous pratiquez ? Avez-vous d'autres pratiques aux vertus similaires ?

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