"Me tenant comme je suis, un pied dans un pays et l'autre en un autre, je trouve ma condition très heureuse, en ce qu'elle est libre." - R. Descartes

jeudi 8 juillet 2010

The Mall version orientale

Les malls ici, c'est la folie.

Premier constat, tout comme en Colombie, à part aller dans un mall ou dans un hôtel, pour s'occuper, il n'y a pas grand chose à faire ici. Il fait trop chaud pour se balader ou se poser dans la nature, d'ailleurs il n'y a pas vraiment d'espace vert ; pas trop d'espaces culturels, ni vraiment de lieux de rassemblement dédié (je vous ai parlé de la pénurie de restos/cafés ?).

Alors tout le monde se rabat sur le mall, espèce d'appendice de ciment, sanctuaire de la consommation. Ici les gens puent l'argent et ils le claquent, entre bijouteries, haute-couture, grosses voitures, montres de luxe. Ils ont beau tous porter des robes, blanches pour les messieurs, noires pour les dames, vus leurs cabas ils doivent tous être comme Superman et dissimuler un caleçon brodé de rubis et une cape en diamant sous leurs vêtements civils, sinon je ne comprends pas...

Mais la consommation ce n'est pas que mettre la main à son portefeuille, demander combien et payer. Ici la consommation c'est aussi la consommation des yeux, et c'est très étrange à dire.

En France tout le monde se plaint de sentir ne pas exister, d'être une miette dans le référentiel du métro maussade qui rend les gens gris (ça marche aussi dans l'autre sens).
Ici, les gens contemplent. Ils contemplent les boutiques, les jolies robes de créateurs, les voitures brillantes, les montres incrustées de diamants, les sacs haute-couture, les écrans plats design. Et puis ils contemplent les autres, les dames en noir, parfois maquillées comme des camions volés, reluquent d'autres dames en noir, tandis que les dames pas en noir les regardent aussi ; et puis les gars en blanc, eux, ils regardent tout ce qui passe. Il marchent en bande, entre mecs. Ils évoluent en ligne, comme les gangs, histoire d'être en confiance peut-être, ils parlent peu, et ils regardent. Rien ne leur échappe. C'est un peu comme aller au musée vous me direz, personnellement je ne sais pas, une chose est sûre, moi aussi je contemple !

Bon après c'est vrai qu'au mall, y a toujours des attractions qu'on verrait nulle part ailleurs (ni en ville, ni dans aucun autre mall ailleurs qu'aux Émirats). L'autre jour c'était un orchestre. Mais attention, les gars ils rigolaient pas, ils étaient en uniforme rouge, et ils étaient genre 418, posés là, à l'intersection de deux couloirs, pas loin d'une fontaine, d'une voiture à vendre, du café de la Paix et du Colombus Café, coincés entre une boutique de Rolex et un vendeur de parfums concentrés. Ah les parfums concentrés : ce sont ces huiles de parfums encore plus de luxe que les versions de luxe européennes, qui coûtent cinq paupières les 3 millilitres, qui sont un mix de Poison, Shalimar et Chanel numéro cinq, et qui te collent à la peau 78 shampoings.

Aujourd'hui, même lieu, différents protagonistes, les hommes en rouge laissaient place à des femmes en satin, des Indiennes en Sari aux couleurs de l'arc-en-ciel, qui dansaient au gré de notes orientales avec le bruit, l'odeur et l'image de la fontaine en arrière plan. Tu m'étonnes que les gars passent leur vie à déambuler dans les couloirs du mall, ou même parfois restent assis là à attendre on ne sait trop quoi (enfin si maintenant).

Mais je caricature, il n'y a pas que des femmes en noir et des hommes en blanc, c'est vilain ce que je fais là. Dépeignons avec plus de nuances le spectacle des badauds du Marina Mall. D'abord il y a des étrangers : genre des blancs, et puis des asiatiques aussi (les gens qui travaillent sur place, et particulièrement les dames, viennent principalement d'Asie orientale). Puis il y a les têtes d'arabes, vêtus à l'occidentale ou à l'orientale, genre à la libanaise ou à la tunisienne : demoiselles maquillées à la truelle et au plâtre, juchées à quinze centimètres du sol et évoluant maladroitement dans cet environnement visiblement hostile, au plancher de marbre bien trop lisse, et gloussant chaque fois qu'elles manquent de se manger par terre; y a les arabes émo, ça fait un choc la première fois, avec les cheveux en mode Mac Guyver qui aurait bouffé Olive et Tom, et qui te mettent mal à l'aise parce que tu as beau chercher, t'arrives vraiment pas à déterminer avec certitude leur sexe tellement dans un cas comme dans l'autre tu sens qu'ils ont manqué une étape de l'évolution naturelle d'un organisme différencié.

Et puis évoquons tout de même cette gothique bien planquée, qui passait carrément inaperçue ici malgré ses yeux façon the Crow, et une choucroute de cheveux (vue sur Amy Winehouse), à peine planquée sous un voile noir assorti à la robe, raccord avec les shoes le tout agrémenté d'un diamant au nez qui était résolument le détail qui tue.

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